

SM appel du devoir, nous ne faisons pas de dentelle. Pistolet à la main, tirez en premier pour tuer les méchants. Comme dans les vieux westerns. Mais qui est le méchant ? Pour le “shérif” antitrust américain, il s’agit clairement de Microsoft. Jeudi 8 décembre, la Federal Trade Commission (FTC), qui supervise la politique de concurrence aux États-Unis, a annoncé son intention de s’opposer à l’acquisition du studio de jeux vidéo Activision, le célèbre appel du devoir. Pour cela, Microsoft a sorti l’artillerie lourde, soit 75 milliards de dollars (71 milliards d’euros), soit la plus grosse opération financière de son histoire.
Pour la FTC, ce rachat pénalise sévèrement la concurrence et, par extension, l’innovation et le consommateur. Cependant, les analystes estiment qu’après l’acquisition, le groupe fondé par Bill Gates détiendrait 11% du marché de l’édition de jeux, derrière le chinois Tencent et le japonais Sony.
Mais les autorités américaines craignent que l’entreprise, déjà troisième fabricant mondial de consoles de jeux, ne saisisse l’opportunité de combiner les deux : la puissance de feu de sa plateforme Xbox et les jeux addictifs d’Activision. “Microsoft aura les moyens et la motivation pour manipuler les prix et dégrader la qualité des produits d’Activision sur les plateformes concurrentes”dit la FTC.
“Idéologique”
Cette pratique de l’intégration verticale est le nouveau combat de la lutte antitrust américaine. Sa patronne, Lina Khan, nommée par Joe Biden, est une opposante reconnue à l’hégémonie des stars du numérique. Le célèbre avocat spécialisé en droit de la concurrence a décortiqué la stratégie d’Amazon, considéré comme le champion de la profession. Les critiques adressées à Microsoft sont du même ordre.
Déjà présent dans les systèmes informatiques et les consoles de jeux, il descend dans le contenu. Et lorsque les consoles ont été supplantées par les jeux en ligne, il tire parti de sa position forte dans le cloud computing pour unifier l’infrastructure, les données des utilisateurs et le contenu sous un même toit. Capter le consommateur en excluant le marché.
Ce vertige de la verticalisation atteignant Amazon, Google ou Facebook n’est pas nouveau. Dans leur livre passionnant Le nouveau western (Le Cherche Midi, 210 pages, 19 euros), les économistes Olivier Bomsel et Rémi Devaux rappellent que la compagnie pétrolière Standard Oil de Rockefeller au XIXe sièclee a été construit sur le même principe au 19ème siècle, en acquérant progressivement tous les acteurs de la filière, du puits à la pompe.
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